Les règles dans le monde : les USA
Savez-vous qu’aux Etats-Unis, pour se prémunir des condamnations morales, la pilule a d’abord été commercialisée en 1957 sous la forme d’un médicament soignant les irrégularités menstruelles et l’endométriose. La contraception étant présentée comme un simple effet secondaire. Ce n’est que trois ans plus tard qu’elle a été officiellement autorisée (alors que 500 000 femmes l’avaient déjà adoptée), et encore uniquement pour les femmes mariées !
Bel exemple du puritanisme américain qui fait un retour en force ces dernières années au point d’entraîner la remise en cause de droits que l’on pensait intouchables, comme le droit à l‘avortement. Un retour en arrière sur lequel plane la menace d’une véritable chasse aux sorcières sous la forme d’une traque du cycle menstruel des femmes. On vous explique tout sur le blog Réjeanne !
Comment sont perçues les menstruations aux Etats-Unis ?
Comme partout ailleurs dans le monde, les règles restent empreintes d’un fort tabou aux Etats-Unis, au point que selon un sondage effectué en 2018, 58 % des Américaines éprouvent de la honte pendant leurs menstruations. Parmi les conséquences de ce tabou, voire de cette stigmatisation sociale des règles, la faible prise en compte de la question de la précarité menstruelle. Et au final, des chiffres terribles, puisqu’en 2019 20% des jeunes américaines ont manqué l’école parce qu’elles n’avaient pas les moyens de s’acheter des produits hygiéniques.
Comme l’a bien exprimé Charlotte Le Flufy, leader de l’impact social mondial de l’entreprise Always, lors de la « Period Conf » organisée à New-York en janvier 2019, « c’est troublant que la précarité menstruelle existe… mais c’est encore plus choquant que des personnes ne sachent pas que ce problème existe ». Une autre intervenante, le Dr Melissa Holmes, a quant à elle souligné que « lorsque nous passons notre vie à porter la honte et l’embarras sur nos épaules, cela affecte notre estime de soi, cela a également un impact sur notre capacité à défendre nos intérêts ».
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La révocation du droit à l’avortement aux USA
Plus grave encore, la Cour suprême des Etats-Unis, dominée par les juges conservateurs, s’est engagée dans une régression historique en remettant en cause le 24 juin dernier l’arrêt Roe vs Wade de 1973, qui autorisait le recours à l’avortement dans l’ensemble du pays. A charge pour chaque État d’autoriser ou d’interdire les IVG. Au final, ce sont environ 26 États qui se sont engagés dans l’interdiction ou la restriction du droit à l’avortement.
Pour le Président Biden, en prenant cette décision, la Cour suprême « ramène littéralement le pays cent cinquante ans en arrière ». Quant à la présidente démocrate de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, elle a estimé que « la Cour suprême sous contrôle républicain » avait atteint son « objectif sombre et extrême d’arracher le droit des femmes à prendre elles-mêmes des décisions sur la santé reproductive ».
Les applications de suivi des règles utilisées pour traquer les femmes pratiquant l’IVG
Dès l’annonce de la décision de la Cour suprême, une inquiétude s’est massivement propagée sur les réseaux sociaux : n’y a-t-il pas un risque pour les Américaines que leur cycle menstruel soit surveillé par le biais des applications de suivi des règles ? Et donc que leur désir d’avoir des enfants soit officiellement contrôlé ?
Il faut savoir qu’aux Etats-Unis, plus de 100 millions de femmes utilisent les applications de suivi du cycle menstruel, qui permettent de prévoir la date des prochaines règles, la période d’ovulation ou de repérer les signes du syndrome prémenstruel. Il faut savoir aussi que toutes ces données personnelles ne sont pas protégées par la loi. C’est à dire que les applis de santé ont le droit de vendre les données des utilisateurs à des tiers, que ce soient des particuliers, des entreprises ou pourquoi pas les pouvoirs publics dans le cadre d’une enquête.
Plusieurs ONG internationales spécialisées dans la protection de la vie privée sur Internet ont enquêté sur les politiques de sécurité de ces applis : informations sur le partage des données, procédures d’identification, contrôle des informations personnelles par les usagères, méthodologies pour sécuriser les données. Avec à la clé la preuve que bien des failles existent… Et notamment, on sait que beaucoup de ces applis partagent leurs données avec des partenaires comme Google, Amazon, Facebook ou d’autres sans que la plupart du temps les usagères en soient informées…
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En France , les réactions ne se sont pas fait attendre face à la remise en cause américaine du droit à l’avortement. Le 30 juin, la majorité présidentielle déposait une proposition de loi à l’Assemblée nationale afin d’inscrire le droit à l’avortement dans la Constitution. Quelques jours plus tard, les députés LFI faisaient de même. A ce jour, les propositions n’ont toujours pas été étudiées, d’autant que la question divise la classe politique, certains jugeant inutile de constitutionnaliser un droit garanti par la loi Veil de 1975. Les débats sont ouverts… Reste que l’exemple américain prouve qu’en termes de droits des femmes, rien n’est jamais définitivement acquis, hélas.
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